Le Poids




© atraxies

Témoignage 1:

Je pense que ce soit inévitable qu’une femme, dans notre société, à un moment ou un autre, pendant une durée longue ou courte, n’ait pas été dérangé par son poids. Pour moi ce n’était jamais, ou alors très peu, quelque chose dont je me préoccupais beaucoup durant ma jeunesse, on me répétait souvent que j’étais une fille très mince et que c’était quelque chose de bien, alors je ne me souciais pas de cela. Pourquoi se préoccuper de quelque chose qui n’est pas mauvais aux yeux des autres ? Ce n’est que lorsque j’ai fait mes 13 ou 14 ans que je prends réellement conscience du fait que mon corps ne ressemble pas à celui que les médias me disent d’avoir. Pourtant pour moi j’étais saine. Je faisais de la danse deux fois, et même plus, par semaine et je mangeais équilibré, mais je réalise que non c’est vrai, mon ventre n’était pas plat et que c’était quelque chose qui, devrait, me déranger/dérangeait. Je me rappellerai toute ma vie du moment où on me l’a vraiment fait remarquer qu’aux yeux de certaines personnes mon corps n’était pas beau : je rentrai d’une répétition de spectacle avec un groupe d’amis dans le train et on parlait de je ne sais plus quoi mais à un moment j’ai dû dire quelque chose qui ne plaisait pas particulièrement à une des personnes présentes, un garçon avec qui je m’entendais assez bien, qui s’est alors permis de me sortir : « Non mais range ton ventre au lieu de dire des conneries ». Cette remarque m’avait vraiment pris par surprise. Je ne l’avais pas insulté, oui j’étais penchée en avant et oui j’avais mis un haut coupé assez court qui montrait quelques bourrelets mais jusqu’à ce moment j’étais confortablement assise, engagée dans la discussion et je ne préoccupais pas à ce moment-là de mon physique. Cet épisode dans le train fut vraiment une sorte de déclic pour mon complexe. Je commençais à plus faire attention de ce que je mettais, de ce que je mangeais, allant même à me priver de certains repas (quelque chose que je ne faisais pas régulièrement mais assez pour que ça fasse un peu d’effet). Il est assez difficile pour moi, encore maintenant, d’assumer complétement mon corps et je ne suis toujours pas complétement à l’aise. Mon complexe est en quelque sorte renforcé indirectement par les gens autour de moi, la majorité de mes amis et amies ayant, à mes yeux, de magnifiques corps, qui serait vu comme ‘acceptables’ pour les médias et l’idée générale de notre société obsédée par le corps. Ma famille aussi le ‘renforce’ aussi indirectement : certains membres de ma famille qui expriment ouvertement que ‘’Oh seulement une toute petite tranche de gâteau, il faut que je fasse attention à ma ligne’’ ou alors ‘’Il faut que je fasse attention à mon ‘Beach Body’’’. Ce complexe, à mes yeux, est ridicule car je connais tellement de personnes qui en ‘souffrent’ et qui vont même jusqu’à se faire du mal pour obtenir un corps que la société trouvera acceptable alors qu’au fond cette idée du ‘corps parfait’ est une idée archaïque et patriarcale mise en place depuis des siècles et qu’il faut briser. Grace à beaucoup de mouvements, tels que le féminisme et le mouvement de Body Positivité, on commence gentiment à établir d’autres normes de beauté pour que tout le monde se sente à l’aise et soit accepté. 


Témoignage 2 :

Mes complexes sur mon poids ont commencé quand j’étais très jeune. En tant que petite fille rondelette j’ai d’abords subi les commentaires de mes proches, mes propre parents, puis de professionnels de santé. Bien avant de subir du harcèlement scolaire c’est une remarque de ma pédiatre qui a marqué un tournant dans la vision que je portais sur mon corps. À douze ans à peine on m’avait déjà planté dans la tête que je devais surveiller mon alimentation. Le plus grand paradoxe dans cette histoire c’est que ma mère, qui travaillait tous les jours avec des anorexiques à l’époque, avait tellement peur que je développe des troubles du comportement alimentaire qu’elle a retiré les piles de notre balance dès le début de mon adolescence. 

Obsédée par un poids que je n’étais pas en mesures de surveiller je me suis mise à faire une fixette sur la nourriture. Après plusieurs années de boulimie assez sévère dont je préfèrerais oublier les détails j’ai fini par basculé de l’autre côté de la maladie. C’est à quinze ans que je me suis mise à compter toutes les calories que j’ingérais. Très vite je faisais des journées où je mangeais à peine la moitié de ce que j’aurais dû à mon âge. 

Évidemment les résultats ont été sans appel. En l’espace de quelques mois j’ai perdu une dizaine de kilos. Après avoir atteint ce que j’estimais être un poids raisonnable j’ai arrêté de compter ce que je mangeais car je ne voulais pas alerter mon entourage.

J’aimerais pouvoir affirmer que les comportements anorexiques ce sont arrêtés là mais la vérité c’est que encore aujourd’hui à chaque fois que je mange je dois lutter pour ne pas penser aux calories. Le pire quand j’essayais de me défaire de mes troubles du comportement alimentaire c’est les compliments que mes proches me faisaient sur ma perte de poids. On continuait de me dire «Tu es tellement plus jolie, ça te va si bien » alors que j’étais juste affreusement malade.  J’ai mis très longtemps à retrouver un poids stable car je ne cessais de maigrir, les portions que j’avais pris l’habitude de manger n’étais simplement pas suffisantes et manger plus me donnait la nausée.

Aujourd’hui, même si je suis encore parfois confrontée à la dysmorphie, j’aime mon corps et j’essaie d’en prendre soin du mieux que je peux. J’aurais aimé ne pas avoir eu à vivre une telle expérience pour en être fière.

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